[OUVERTURE PUBLIQUE] Jardin mémoriel entre terre et ciel à Charleroi

19.09.2023

Le jardin mémoriel des victimes de Dutroux :
un lieu de rencontre apaisant pour les
habitants de la région.

La Ville de Charleroi a récemment créé un jardin mémoriel en l’honneur de Julie, Mélissa, Sabine, Laetitia, An et Eefje, les victimes de Marc Dutroux. L’équipe de conception, une collaboration entre les architectes de RESERVOIR A, les architectes paysagistes de Carbonifère, l’artiste Christophe Terlinden et la Cellule Charleroi Bouwmeester, place la réhabilitation du quartier et de ses habitants au premier plan. Le projet généreux, commandé par la ville de Charleroi, prévoit un espace où chacun se sentira accueillie.

 

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Construire l’ineffable
Entre 1995 et 1996, la Ville de Charleroi a connu une histoire sordide, qui a brisé et marqué à jamais la vie de plusieurs familles dont les fillettes ont été séquestrées. L’innommable qu’ont subi Julie, Mélissa, Sabine et Laetitia, An et Eefje a consterné tout un quartier et ébranlé tout le pays.
Le rôle réparateur de cet espace de mémoire s’est imposé comme une évidence. En collaboration avec la cellule Charleroi Bouwmeester, en étroite concertation avec les proches des victimes, les architectes du RESERVOIR A, les architectes paysagistes Carbonifère et l’artiste Christophe Terlinden ont réussi à répondre à l’indicible. Ils ont réussi à transformer ce lieu très chargé en un espace de rencontre. L’espace reprend vie aujourd’hui grâce à un lieu de mémoire, un jardin merveilleux, entre terre et ciel, qui laisse place à la couleur, la douceur et la lumière.

 

 

«L’espace reprend vie aujourd’hui grâce à un lieu de mémoire, un jardin merveilleux, entre
terre et ciel, qui laisse place à la couleur, la douceur et la lumière.»
Julien Dailly, architecte administrateur RESERVOIR A

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Un contexte urbain difficile
Le jardin mémoriel s’implante à Marcinelle, à la limite sud-est du centre-ville, entre l’avenue de Philippeville et la rue des Damzelles qui rejoint la Grand Place. Le site a évidemment été impacté par l’histoire sinistre qui s’y est déroulée et par la déterioration de la maison condamnée qui a suivi. Lorsque les maisons n°128 et n°124 de l’avenue de Philippeville ont été démolies en 2022, une surface d’environ 250m² a été libérée avec pour visée la création du jardin mémoriel. Outre la réhabilitation de ces parcelles, le projet inclut la rénovation de la voirie au droit du jardin pour modifier durablement l’image du quartier.

Un jardin qui apporte sollicitude et soin
Le jardin mémoriel contribue à la valorisation paysagère et à la revalorisation urbaine des parcelles démolies et des rues adjacentes. Il tend à créer un espace qui apporte sollicitude et soin. Les concepteurs se sont inspirés de la définition donnée à la notion de « care » par les philosophes politiques américaines Joan Tronto et Berenice Fischer : « Le care peut être considéré comme une activité caractéristique de l’espèce humaine qui inclut tout ce que nous faisons pour maintenir, perpétuer et réparer notre « monde », en sorte que nous puissions y vivre aussi bien que possible. Ce monde comprend nos corps, nous-mêmes et notre environnement, tous éléments que nous cherchons à relier en un réseau complexe, en soutien à la vie ». 

Le projet fait preuve de retenue dans la manière de penser et construire cet espace pour que toute personne s’y sente accueillie tout en n’offrant qu’à la vue seulement la possibilité de jouir de ce jardin généreux. La hauteur du mur d’enceinte du jardin garantit en effet une certaine distanciation des passants et des passantes de la partie mémorielle du projet afin de préserver la sérénité et la propreté du lieu.

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Une architecture riche en symboles
Au départ, les parents des victimes ne voulaient pas que la maison de Dutroux soit détruite. Ils souhaitaient en faire un lieu de transmission de mémoire. Après un accord mutuel, il a néanmoins été décidé de démolir les maisons pour faire place à un jardin mémoriel. Un mur de briques de 93 cm d’épaisseur entoure le jardin. Au-delà de ce mur d’enceinte protecteur, le jardin s’élève et prend la forme d’un tumulus qui s’intègre subtilement dans le paysage. Dans une alcôve, on peut rendre hommage, en déposant une fleur ou une bougie. Chacun peut s’y recueillir à sa manière. L’ensemble est éclairé par un lampadaire existant, à l’intersection des deux routes adjacentes, qui est simplement rénové et retourné vers le jardin suivant la proposition de l’artiste Christophe Terlinden. L’orientation de la source lumineuse couvre la chaussée et le parterre, tandis qu’un éclairage spécifique à l’intérieur du jardin met en lumière les arbres.

Des matériaux apportant des contrastes 
Les mitoyens mis à nu lors des travaux de démolition ont nécessité la réalisation de contrefort qui ont été intégrés dans la composition. Leur positionnement en retrait minimise la présence de recoins dans l’espace public. Cette composition confère aux deux murs le statut de façade à part entière offrant une protection au tumulus abondamment planté. Les concepteurs utilisent les matériaux tels qu’ils sont. La brique blanche émaillée reflète la lumière même un jour morose. Des pavés en terre cuite forment la surface du sol. Leurs dimensions (206 x 51 x 85 mm) se rapprochent de celles des briques utilisées pour la maçonnerie des murs, ce qui leur confère une certaine uniformité. Le coloris du pavé utilisé est un gris anthracite-brun avec une nuance de rouge, clin d’œil aux façades du quartier.

 

 

«On utilise les matériaux tels qu’ils sont. La brique blanche émaillée reflète la
lumière même un jour morose. Des pavés en terre cuite forment la surface du sol.»

Julien Dailly, architect associé RESERVOIR A

Une flore délicate pour changer de paysage 
Le tumulus offre aux habitants du quartier un espace vert, avec une végétation colorée qui évolue tout au long de l’année au gré des saisons. Les espèces végétales ont été soigneusement choisies par les paysagistes de Carbonifère, en collaboration avec la cellule Charleroi Bouwmeester. Des fleurs blanches, roses et violettes peuplent un tapis à feuilles persistantes. L’ensemble rassemble des espèces locales et plus exotiques, dont trois arbres : un davidia involucrata, plus connu sous le nom d’arbre aux mouchoirs, un cornouiller rose du Japon et un amélanchier de Lamarck. Le parterre de fleurs contient divers bulbes, dont des jonquilles et des plantes vivaces.

Une intervention murale réinterprétée
Une fresque a longtemps camouflé les panneaux qui recouvraient la façade de la maison Dutroux. Elle représentait l’image pleine d’espoir d’un enfant qui s’élance, libre et serein, au-dessus duquel vole un cerf-volant Cette illustration est entrée dans la conscience collective des habitants et habitantes de Charleroi. L’artiste Christophe Terlinden l’a réinterprétée sur l’un des murs adjacents. Il a procédé à la mise à l’échelle et à la réalisation sur les briques émaillées avant même les travaux. Mais son implication va au-delà de cette fresque : des interventions telles que l’alcôve, l’éclairage, la hauteur des murs, la géométrie générale du projet font aussi partie de ses interventions.

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INFORMATIONS PRATIQUES

COMMANDITAIRE : Ville de Charleroi
ADRESSE :
Avenue de Philippeville n°124 et 128, 6001 Charleroi

ARCHITECTE :
RESERVOIR A en collaboration avec Charleroi Bouwmeester (CB)
STABILITÉ : GEI
PAYSAGISTE : Carbonifère
ARTISTE : Christophe Terlinden

TYPE : espace public
SURFACE BÂTIE BRUTE : +/- 250m²
DÉBUT – RÉCEPTION : 01/2021 – 05/2023

PHOTOGRAPHIE : Marie-Noëlle Dailly

 

CONTACT PRESSE
Siska Claessens
siska@siskaclaessens.be
+32 (0) 476 99 15 54

À propos de Christophe Terlinden
L’œuvre de Christoph Terlinden est très variée : des dessins aux espaces publics, en passant par le son, la vidéo, le graphisme, le design, etc. Ses œuvres sont souvent le résultat d’un geste innocent ou minimaliste, chargé d’une vision politique et poétique. Les interventions se situent souvent dans des contextes spécifiques dont elles exposent les caractéristiques, les défauts ou les limites. De manière généreuse, sournoise, humoristique et poétique, Terlinden explore les interstices qui relient l’art et la vie.
 
À propos de Carbonifère
Carbonifère est une équipe pluridisciplinaire d’architectes, d’architectes paysagistes et de graphistes basée à Charleroi. Le studio de design propose des solutions globales pour les espaces de vie. Il intervient dans les domaines de l’architecture du paysage, de l’urbanisme, de la cartographie, de la gestion et du design écologique, du mobilier urbain, des installations artistiques, du design d’objet, du graphisme, de la signalétique et de l’enseigne. Carbonifère travaille avec des spécialistes dans les domaines de la science et de l’art (botanistes, producteurs, entomologistes, ingénieurs, photographes…).

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